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Franco-Hungarian Literary Relations

GAR401

Paris
Date: 12-02-1961
Language: French
Repository: Petőfi Museum of Literature
Document type: Typed letter
Publisher: Tüskés Anna (24-07-2017)
Folio number: 1

Mon cher Rousselot,

Je viens de vous faire un gros envoi mais je m’aperçois que je vous dois encore les explications réclamées cur le Char d’Elie. Ce poème a été écrit à l’époque symboliste d’Ady (il est le titre même d’un de ses recueils) il est très beau en hongrois et très caractéristique.

Voici le sens : Dieu attire « en son espace » tous ceux qu’il aime et qu’il châtie comme il l’a fait avec le prophète Elie. Ce prophète, comme vous le savez, a été emporté au ciel sur un char brûlant. Pour Ady, la « race d’Elie » dont il est question sont les poètes, ou du moins ceux qui « sentent » et les chars de feu qui les emportent sont leur propre coeur.

La traduction de Manoll est fidèle quant au texte, mais j’ai maintenant très peur que le symbole pourtant très clair à mes yeux, échappe au lecteur. Alors que faire ? Voici en tous cas une traduction « sens à sens » du poème :

Dieu attire en son espace tous ceux
Qu’il aime et qu’il frappe ainsi qu’il fit pour Elie
Il leur donne des coeurs enflammés et vifs
Voilà les fameux chars de flamme

La race d’Elie s’élance vers le ciel
Et gravit l’horizon où l’hiver est éternel

Sur les sommets glacés des Himalayas
Leur char en grondant fait voler la neige.

Entre terre et ciel, mornes, sans patrie
Le vent du destin sans cesse les pousse
Vers les splendeurs froides et méchantes
Et le char poursuit sa course sans fin.

Leur coeur est brûlant, leur cerveau est glacé (=ceux de la race d’Elie)
La terre les voit avec dérison
Mais le soleil compatissant sème des diamants
De glace sur leur route désolée.

Vers de 9/8 c’est à dire en français 10/10 ou 8/8.

Est-ce plus clair ainsi ?

Bien à vous.

Ladislas