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Franco-Hungarian Literary Relations

GAR451

29 rue Surcouf, Paris, 7ème
Date: 29-05-1959
Language: French
Repository: Petőfi Museum of Literature
Document type: Typed letter
Publisher: Tüskés Anna (31-07-2017)
Folio number: 1

Mon cher Laci,

J’écris ces lignes en français pare que je voudrais les montrer à un ami poète. Je suis ravi que tu aies jugé les traductions des poèmes hongrois que je t’ai montrés satisfaisantes. J’en ai fait retaper quelques-unes – j’en ai à peu près une centaine – et je serais curieux que tu les confrontes un peu avec les originaux. Certaines n’ont pas été suffisamment revues : comme tu sais, j’ai interrompu le travail avec quelaues poètes après la révolution hongroise. Mais j’ai continué le travail avec d’autres, et de cette collaboration est sortie, notamment, une cinquantaine de poèmes de Petőfi, de Kassak, de Füst et d’autres encore.

Je t’ai proposé avec le plus grand sérieux de t’associer à ce travail, « à part entière », comme dirait de Gaulle. Jamais je ne prendrai seul la responsabilité du choix. Au moment où je l’ai commencé, c’est Illyès qui devait l’établir et le superviser : je possède encore la liste provisoire établie par ses soins des poètes du 20ème siècle. Füst m’a aussi envoyé une liste de poèmes qu’il aime tout particulièrement, et même le texte de certaines oeuvres introuvables en librairie. Depuis, cependant, et d’un commun accord, Illyès et moi nous ne correspondons plus (je reste son ami fidèle et je m’occupe de sa fille, qui est ici), car il ne serait pas prudent qu’il ait des rapport épistolaires avec moi. Tu me comprendras parfaitement.

D’après les premiers projets, cette anthologie, selon la formule d’Illyès, devrait aller « de Balassi à Kucka ». Elle devait comprendre deux cents poèmes, dont peut-être quelques poésies populaires.

Comme tu es toi-même auteur d’un athologie, que hélas je n’ai pas encore pu lire, bien que tout le monde m’en dise le plus grand bien, et que d’autre part tu n’es pas sans connaître le goût des Occidentaux, je pense que ta collaboration pourrait se révéler extrêmement précieuse.

Actuellement, comme je te l’ai dit, je suis en panne. Ce n’est pas qu’un certain nombre de poètes français ne soient disposés à continuer leur travail d’adaptation, mais je ne voudrais pas leur demander leur collaboration à titre tout à fait gracieux. Jusqu’ici, j’ai payé quatre mille francs pour une adaptation, ce qui est évidemment une somme symbolique, et je voudrais pouvoir continuer à peu près sur les mêmes bases. Lorsque Koesler est passé en coup de vent par Paris, je lui en ai touché un mot mais, pas plus qu’avec toi je n’ai eu le temps de bien lui expliquer les choses. Mon idée est de terminer le soumettre à l’UNESCO pour que cette organisation patronne sa publication. L’UNESCO a déjà patronné d’autres recueils de poésie (notamment polonais), et je pense qu’avec les relations que nous possédons nous pourrons obtenir son concours. Dans ce cas, bien sûr, les Hongrois de Budapest n’oseraient pas nous mettre des bâtons dans les roues. Cela d’autant moins que je me fais fort de trouver un éditeur qui, s’il ne versera pas d’honoraires, publiera au moins le recueil.

Ce que j’aurais voulu demander à Koestler c’est, d’une part, s’il peut soutenir cette publication dans les milieux de l’UNESCO, et si, éventuellement, il consentirait à intervenir auprès du Found for intellectual Freedom pour que cet organisme avance les honraires des traducteurs. Il va sans dire que, personnellement, je ne veux pas un sou. Je crois qu’avec cinq ou six livres sterling, environ, tous les frais pourraient être couvents.

Je te serais très reconnaissant si tu voulais en parler personnellement avec Koestler, car ces choses là ne se traitent pas par correspondance. Dis-moi si c’est possible.

Je suis bien intervenu pour trouver une chambre pour Vas, au Pen Club, malheureusement ils n’ont que quatre chambres qui sont retenues depuis des semaines. Je lui ai loué une chambre dans un petit hôtel et pourrai trouver les quelques milliers de francs qui lui seront nécessaires pour passer quelques jours en France.

Inutile de te répéter combien je tiens à cette anthologie. Si nous la menons à bien, j’aurais au moins conscience d’avoir fait oeuvre utile.

Bien à toi