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Franco-Hungarian Literary Relations

GAR439

Paris
Date: 14 December [1958-1959?]
Language: French
Repository: Petőfi Museum of Literature
Document type: Typed letter
Publisher: Tüskés Anna (29-07-2017)
Folio number: 1

Mon cher Gyuri,

Je te renvoie ci-contre la traduction de l’article consacré au livre de Méray. Un traducteur ne doit pas donner son avis, mais je me considère autant comme ton ami que comme ton traducteur. Aussi je me permets quelques remarques.

Tout ce que tu dis du caractère de Nagy, du déroulement des évènements, du jeu des forces contradictoires, etc. est extrêmement intéressant et ne fait d’ailleurs que confirmer mon opinion, à savoir que tu devrais, et le plus tôt serait le mieux, écrire toi-même un ouvrage historique sur la révolution et sur Nagy, en t’étendant naturellement sur ce que tu as vu et entendu par toi-même.

Tout ce que tu dis du livre de Méray et de son interprétation des faits me semble d’une sévérité excessive. N’oublie pas que l’ouvrage de Méray a été le premier du genre et qu’il n’avait nullement l’intention d’être une explication scientifique et définitive. Il le dit lui-même très nettement dans sa préface. Je connais ce livre, puisque je l’ai traduit, et je connais celui de Molnar pour la même raison, et je puis te dire en connaissance de cause que 70% au moins des éléments de ces deux ouvrages sont identiques en dépit d’une présentation très différente. Je crois comprendre que c’est en premier lieu la forme choisie par Méray qui te hérisse, mais que cette forme est adaptée au grand public peu sensible aux études trop rigoureuses. D’ailleurs ses moyens ne sont pas toujours ceux du reportage, mais très souvant littéraires et psychologiques.

Tout cela, évidemment, n’a aucune importance, et Méray est assez grand garçon pour se défendre lui-même. Ce qui me navre, cependant, c’est que tu emploies pour le critiquer un ton polémique des plus acerbes, comme s’il était un Mindszentiste ou un Fabianiste. Or Méray a tout de même collaboré à ta revue, et je crains que la discussion n’envenime non sulement vos rapports mais n’apporte, de plus, de l’eau au moulin des kadariste qui pourront fort bien exploiter cette affaire pour présenter l’émigration « révisionsite » comme un panier de crabes.

A ta place, j’atténuerais sensiblement le côté virulent de cet article, et je provoquerais au besoin une discussion sur l’attitude de Nagy pendant la révolution, demandant même à Méray de répondre. Au cas où tu accepterais ces suggestions, je participerais moi-même volontiers à la discussion. Veuille croire, surtout, que c’est uniquement par amitié que je me permets de formuler ces quelques remarques.

L’article de Balazs (il me fait pisser du sang) est en cours de traduction.

Bien à toi