BLE PC 398

Paris
Date: 06-05-1979
Language: French
Repository: Private ownership
Document type: Letter written by hand
Publisher: Tüskés Anna (31-12-2017)
Folio number:

Très cher André et Margit,

Je suis un monstre d’ingratitude, et de grossiereté de n’avoir pas encore écrit depuis que j’ai reçu ces Vanessa hongrois qui existent grâce à vous. Je trouve très agréables le format et la couverture. Je rougis de la postface flatteuse, je suis ébloui par le travail de traduction de Margit, et sans être à même en apprécier les finesses, j’en imagine les difficultés. Tout cela été un plaisir et un réconfort dans un moment difficile et d’écriture forcenée où je suis talonné par le temps. Faubourg des Amériques, mon dernier roman, n’a pas été un succès public, les droits abondants du Palanguin des Larmes sont taris, et je ne suis plus journaliste salarié… D’où quelques acrobaties. Je travaille en ce moment à une biographie romancée de John Smith, fondateur de Jamestown, première ville des futurs Etats-Unis, c’est un livre que m’a commandé Jean-Claude Lattès, un éditeur qui sait „se défendre” et qui est en passe de devenir le premier du moins par les chiffres…

Pour ce travail, qui me permet de vivre j’ai remis à l’année prochaine un roman presque terminé et destiné à {Grasset et qui a pour cadre un pays asiatique. Je voudrais publier un livre qui me permette de vivre quelques années en paix et ne plus écrire. Pour qui et pour quoi? Ne voyez là aucune amertume. Simplement le spectacle de l’intelligentzia parisienne est celui d’un cirque dont les grimaces ne m’intéressent plus. Un petit nombre de notables de la penséese complimentent les uns les autres, et pour si peu de choses! Je ne lis plus que Chaleau [?], Cioran et… {Aleyandre Vialatte|6177} dont Julliard vient de publier en un premier volume les merveilleuses chroniques sous le titre „Premières Nouvelles de l’Homme” – Si vous ne venez pas prochainement à Paris, je voudrais vous l’envoyer. Ou alors il vous attendra ici.

J’ai une année chargée et vis le plus souvent hors de Paris dans la maison de campagne de Kessel. Si vous venez, surtout faites-moi savoir vos dates le plus tôt possibles, afin que nous ayons un long déjeuner chez moi ou ailleurs. Et sinon, parlez-moi de vos vies et des vos travaux, puisque vous êtes tous les deux d’éblouissants travailleurs, et j’ai lieu d’être fier de ce que vous avez fait pour nous.

Croyez l’un et l’autre à ma fidèle amitié

G. Walter

Ma mère (qui a 86 ans) voudrait faire un dernier voyage en Hongrie à l’automne. Si elle se porte assez bien je l’accompagnerai peut-être.