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Franco-Hungarian Literary Relations

FG_BLE30

Nice
Budapest
Date: 27-09-1978
Language: French
Repository: Petőfi Museum of Literature
Document type: Letter written by hand
Publisher: Tüskés Anna (02-08-2017)
Folio number: 2

Mon cher André

Je viens de recevoir ta lettre et je te réponds de suite. Je n’ai jamais tenu de journal ni pris de notes sur aucun événement qui me concernait ou dont j’ai été le témoins. Aussi mes souvenirs relatifs au comte et à la comtesse de Dampierre, à l’époque où il était ministre de France à Budapest, bien que nous ayons, Irène et moi, très souvent déjeuné et passé l’après-midi avec eux à la Légation, risquent-ils de t’apporter peu de renseignements utilisables pour ce que tu médites.

Autant que je me le rappelle et Irène est d’avis que je ne me trompe pas, Leila – mais j’ai oublié son nom de jeune fille – n’était pas libanaise mais d’une grande famille chrétienne de Turquie. Un de ses frères a été ambassadeur de Turquie. Ou, je l’igore.

Elle n’était pas seulement poète mais peintre. Ses tableaux étaient très décoratifs, de couleurs très vives, beaucoup de motifs de fleurs. Nous ne nous rappelons plus si c’est à la Légation ou ailleurs qu’on avait organisé une exposition de ses oeuvres dont un grand nombre a été acheté car il s’agissait d’une vente de charité dont le produit a permis d’acheter des quantités considérables de viandes d’oies fumées, de diverses conserves et de cigarettes, permettant de faire des centaines et des centaines de paquets envoyés aux prisonniers français en Allemagne. Irène se rappelle que, pendant 8 ans, avec les autres dames des membres de la Légation, elle se réunissait chaque mardi dans une des pièces de la Légation pour faire ces paquets qui contenaient, outre les vivres, des lainages. Dampierre avait donné sa démission en 42 – je suppose que c’est après que les Allemands aient envahi en nov. la zone française non occupée. Elle raconte certainement comment, après qu’ils aient quitté la Légation, elle a été arrétée dans la villa qu’ils habitaient, un dimanche matin par le Gestapo, alors que Dampierre était allé avec leur fille Anne assister à la messe, et comment celui qui était alors ministre de France, Brévié, l’a caché dans une des chambres à peu près jusqu’au moment je pense où au début du règne des Croix flèchées le Ministre des Affaires Etrangères d’alors nous a déclaré – j’accompagnais le chargé d’affaires d’alors, Christian de Charmasse, pour servir d’interprète, en tant qu’attaché de presse adjoint – que si nous n’acceptions pas de représenter le gouvernement Pétain en exil, l’immunité diplomatique nous était retirée et qu’on ne pouvait plus empêcher le Gestapo de pénétrer à la Légation ce qu’elle a fait et y a arrêté le consul Sylvestre Nugues. Les deux Dampierre, lui en dépit de son apparence d’aristocrate et diplomate, un peu distant à première vue, étaient d’une grande affabilité. Elle s’intéressait à tout, la littérature et beaux arts et je l’ai emmenée une fois chez Hatvany Ferenc pour lui montrer la collection de celui-ci. Parmi ceux des membres hongrois qu’on rencontrait chez elle il y avait Batthyány Gyula. S’est aussi par elle que nous nous sommes liés d’amitié avec Louise de Vilmorin. Je ne sais plus à quelle occasion, après la libération de la Hongrie et au moment où j’étais chargé des questions culturelles et de presse de la future Représentation des Intérêts français en Hongrie, alors comité de Gaulle, elle est passée me chercher Benczúr u. où nous avions notre siège et habitions, pour l’accompagner dans un camion russe, afin de récupérer, il me semble, des effets appartenant à son mari, dans un château des environs. Elle était pleine d’allant et de détermination dans tout ce qu’elle entreprenait.

Ceux qui peuvent te fournir des renseignements peut-être plus précis, bien qu’ils aient assez tôt quitté la Légation pour passer chez de Gaulle au Moyen-Orient, ce sont l’ancien attaché commercial Jacques Diemer et sa femme Geneviève. Je te donne leur qdresse M. et Mme Jacques Diemer 26 Promenade Mona Lisa Résidence du Grand Siècle 78000 Versailles. Est-ce que la comtesse Almássy ne pourrait pas te parler d’eux ? Est-ce que quelqu’un qui les a aussi bien connus et qui, selon Irène, avait publié dans un quotidien un interview avec Dampierre, peu après sa nomination à Budapest, Maté Klari dont le mari était pasteur protestant, vit encore et peut-tu la retrouver ?

Je reçois régulièrement Kritika donc inutile de m’envoyer l’article sur Politzer.

Merci pour tes adresses de Mâcon et de Paris.

Tu me parles d’un article de notre ami Koltai-Kovacs. De quoi s’agit-il. Lui et Martha nous ont envoyé des cartes d’Italie, d’Espagne et de Pologne. Mais c’était au moment de la maladie d’Irène après son opération. Il va falloir que je leur mette un mot.

Bien à toi affectueusement, mon cher André.

FGachot