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Franco-Hungarian Literary Relations

NNA004

Budapest
Paris
Date: 19-02-1947
Language: French
Repository: Petőfi Museum of Literature
Document type: Draft
Publisher: Tüskés Anna (21-04-2017)
Folio number: 2

Cher Monsieur Bordry

votre aimable lettre m’est parvenue ; c’est avec une joie et une surprise extrême que je l’ai lue, tenant pour un grand honneur, que les milieux littérairs français s’intéressent à la vie spirituelle hongroise – surtout aux jeunes écrivains hongrois. Ce geste témoigne d’une curiosité tellement bienveillante, qu’il me rend presque inutile de dire : chez nous, c’est vraiment une vie littéraire très animée, et la terminaison de la guerre, ainsi que les changements sociaux n’ont fait qu’augmenter l’élan des arts. Je suis sure, que, nos amis, les écrivains plus âgés – MM. Bóka, Képes – auxquels vous avez aussi écrit, vous ont tracé plus détaillément l’évolution de la vie spirituelle en Hongrie – c’est pourquoi il ne me reste qu’à vous rendre compte de la situation des jeunes.

Vu, qu’il s’agit de la littérature vivante, c’est tout naturel (et surtout après une telle guerre) qu’il nous faut parler tout particuilèrement des disputes. Ce sont les mêmes discussions, aui sont actuellement en cours dans toute l’Europe, entre marxisme et existentialisme, réalisme et surréalisme, entre écoles et sectes idéalistes et matérialistes. La jeunesse proprement dite a deux <écoles> revues, autour desquelles ces débats se crystallisent : c’est le Valóság (Réalité), périodique des jeunes marxistes, de caractère politique ou plutôt sociologique (dont le rédacteur est M. Márkus...), et le Újhold (Nouvelle Lune), rédigée par mon mari, {L[engyel].B[alázs].|1111} (...) critique, essayiste. Puisque vous vous intéressez surtout aux écrivains, je vous en présente quelques jeunes (entre 20-30 ans), groupé autour de la « Nouvelle Lune ».

Georges Somlyó, (...), actuellement à Paris, poète, critique, choisissant des formes difficiles, compliquées à l’extrême, toujours en recherche passionnée de la vérité, traducteur et disciple de Valéry – et des marxistes.

{Jean Pil[inszky]|1354}, poète passionné et ascétique, qui semble se développer vers des hauteurs éblouissantes – le porteur du prix Baumgarten 1946 (le plus grand prix litt. en Hongrie).

Georges Rába, poète fin, élégant, poésie harmonieuse, philologue cultivé.

Georges Végh, poète, notre « éternel adolescent », d’une verve, d’un humour farouche, en constante révolte contre la société et soi-même, et tout cela dans les dormes on ne peut plus harmonieuses, équiliblées.

Iván Mandy, écrit des nouvelles, puisant ses thèmes de la vie des couches sociales inférieures, d’un style dur, d’une architectonique solide.

{François Kar[inthy]|1319}., fils d’un de nos plus grands écrivains satiriques, Frédéric K., mort avant dix ans, qui semble se vouer au roman ; nous attendons beaucoup de lui d’après ses deux derniers; l’un de la vie des adolescents intellectuels, d’autre des étudiants de la faculté philologique.

{Nicolas Gy[árfás].|1308}, prosateur et publiciste, écrivain aussi des drames, avec un fort penchant vers le grotesque abstrait.

{Nic. Sz[abolcsy].|1380}, critique, professeur de lycée, s’occupe surtout de la philologie française. Unit une tension scientifique avec de l’esprit vif, un filologue – ?? me.

Et, pour satisfaire à votre voeu, que j’écrive encore quelques chose de moi-même ; j’écris des vers, mon premier volume vient de paraître, d’ailleur, je viens de terminer un roman, pour ainsi dire, policier-littéraire. La Nouvelle Lune, et avec elle moi-même, nous sommes les partisans de l’art pour l’art (il me faut ajouter que je ne sais pas quel retentissement ce mot a-t-il en ce moment en France – chez nous, il veut proclamer l’autonomie et l’exemption des influences étrangères de la littérature, de principe que l’écrivain ne doit – qu’écrire. Il faut remarquer, sachant qu’en Europe occidentale d’autres rumeurs circulent – que chez nous chaque « clerc » peut proclamer ce qu’il veut, tout naturellement dans les cadres d’une idéologie progressive. (Ce qui est prouvé par l’existence même de notre ??.) Tout naturellement, une manière de voir qui se manifeste principalement dans les oeuvres, dans les rapports les plus cachés du style et de la composition, est très difficile et même comique à caractériser globalement. Pourtant, j’espère que les lettres que vous avez reçu d’autres, vous ont aidé de former un image complet de notre littérature.

J’ai fait parvenir la lettre jointe à Weöres, qui, d’ailleurs, est surement l’un des plus intéressants, j’oserais même dire, génials poètes de notre peuple.

Je vous remercie encore une fois pour votre intérèt, et je serais heureuse, si j’aurais pu contribuer avec quelques chose <à la> au programme de la Radio. Si vous vous intéressez à des problèmes concrets, ou à un compte-rendu plus détaillé de notre vie spirituelle, je seais volontiers à votre service – car nous sommes tous heureux, si nous pouvons donner quelques signe de la jeune litt. hongr. vers la France.

Avant de terminer, encore quelques chose : ici, nous suivons avec attention toutes les manifestations de la vie littéraire française, vous connaissez surement la vieille nostalgie qui nous traîne vers la France, et nous lisons vos livres et vos périodiques. Pourtant, nous voudrions aussi connaître, les organes des plus jeunes.

Remerciant encore une fois votre aimable lettre, je vous salue A. Nemes Nagy