IGY027

UNION INTERNATIONALE DE RADIODIFFUSION (U.I.R.) GENEVE
Date: 31-10-1947
Language: French
Repository: Private ownership
Document type: Typed letter
Publisher: Tüskés Anna (10-11-2017)
Folio number: 1

Cher Monsieur Illyés,

Je sais par {Kristofy|} que la question du transfert effectif des fonds pour Présence vous a donné, comme à nous, quelque inquiétude. J’ai eu deux ou trois fois, à ce sujet, Miklos au bout du fil. Hier enfin, il a annoncé à Kristofy que les fonds étaient définitivement partis pour Berne. après qu’il fût intervenu personnellement auprès de l’organisme banquaire compétent. Je comprends très bien toutes les difficultés rencontrées en l’occurrence. Rien n’est aisé aussi quand on doit en passer par les Bureaux!

J’ai maintenu le contact avec les Editions du Mont-Blanc, et si l’argent est arrivé la semaine prochaine, je pense que nous pourrons prendre une décision, en prévoyant peut-être un accord provisoire de six mois pour l’administration et la diffusion. Sauf le cas de nouveau retard, nous pourrons paraître en janvier. La publicité de son côté, comme vous savez, exige quelques semaines de travail, et j’aimerais que nous puissions paraître avec un lot déjà normal d’annonces, bien présentées. C’est, pour la revue, un appoint important.

J’ai suggéré déjà à Miklos que l'on porte, si fairé se peut et si vous êtes d’accord, mon indemnité mensuelle à 300 francs au lieu de 200, afin de compenser mieux les quelques travaux journalistiques auxquels je dois renoncer pour me vouer à Présence (je ne garde qu’une chronique régulière au Journal de Genève, mais je n’aurai guère de temps pour le reste, au début du moins). Si la publicité est suffisante, je m’arrangerai peut-être d’ici trois ŕ quatre mois pour prélever sur le montant des annonces cette différence de 100 francs, ou davantage. Je m’arrangerai pour cela avec l’administration. Il faut évidemment ne pas trop grever notre budget initial.

Pour le dépôt des fonds à Genève, le mieux serait sans doute (comme vous l’avez prévu) d’ouvrir en banque un compte courant à votre nom. vous me donneriez la procuration. Tout prélèvement sur ce compte ferait l’objet d’un bordereau que vous adresserait la banque, et je vous indiquerais moi-meme chapu fais sur une note à part l’affectation des sommes, c’est-à-dire le détail. Vous auriez ainsi un contrôle suivi des prélèvements, comme il est juste. Jeverrai aussi à vous proposer sous peu un expert-comptable qualifié. A part mes indemnités mensuelles, je ne prévois du reste aucun prélčvement avant la première facture de l’imprimeur, sauf un montant de 50 francs pour des maquettes de couverture.

Avec l'Italie, les échanges commencent à être nourris. Vittorini, Montais, Moravia, nous aident. Vittorini se met tout à notre service.

Pour ce qui concerne les Français, je ne veux pas écrire à Eluard, Paulhan et Camus avant l’arrivée des fonds. J’ai demandé à M. Gyergyai si je puis expressément rappeler à ces Messieurs leur accord de principe pour le comité. Je n’ai pas encore sa réponse à ce sujet.

D’ailleurs, Je crois qu’il ne faut pas trop nous hâter de constituer ce comité. Il sera temps de toucher lesintéressés lorsque tout sera définitivement organisé ou même lorsque le premier numéro aura paru. Nous devons faire la preuve de notre activité avant de trop remuer les uns et les autres ! Je pense que vous ętes d’accord avec moi sur ce point.

Nous avons pu obtenir la collaboration de deux importants Prix Pulitzer 1947: le romancier -Pennwarren, et le poète Robert Lowell. C’est un excellent aperçu de la jeune littérature américaine, pour le No.1 ou 2.

Par l'entremise d'un ami, j’ai relancé par ailleurs Herbert Read et T.S. Eliot, et l’équipe de la revue "Horizon" (Londres) nous aidera aussi.

Il serait peut-être bon d'avoir dans le No.1 un panorama de la littérature hongroise actuelle, ce qui serait une excellente introduction aux auteurs proprement dits. Je verrai sous peu M. Duckworth-Barker.

Nousprévoyons une partie Chroniques et Notes très nourrie, et d’un ton passablement critique, éventuellement des enquêtes, des faits divers d'un intérêt général, etc. Cela donnerait à la revue une certaine vivacité d'allure. Pour les premiers hors-texte, je m’occupe de réunir une documentation sur le cinéma italien contemporain, que je vous montrerai. (Vous avez sans doute vu à paris les récents films italiens: Paďsa, notamment).

Soyez assuré que nous ferons pour le mieux, et en comprimant le plus possible toutes les dépenses. Je compte beaucoup sur la diffusion assurée par les éditions du Mont-Blanc, sur la publicité et les abonnements au cours des six premiers mois, pour donner à la revue son équilibre et la faire pénétrer un peu partout. Je ne sais si vous avez déjà prévu tel ou tel organisme banquaire. J’ai, à la Banque Populaire Suisse, l quai des Bergues, un ami dévoué (ancien camarade de service militaire), qui pourrait éventuellement nous faciliter lea choses: M. Racine,

Je m'excuse de vous écrire aussi longuement (et à la hâte!), et vous prie de croire, cher Monsieur Illyés, à mes sentiments cordialement dévoués

Gilbert Trolliet