VAR005
Language: French
Repository: Petőfi Museum of Literature
Document type: Letter written by hand
Publisher: Tüskés Anna (16-05-2017)
Folio number: 2
Bien chez Monsieur,
Fort touché de la sympathique manière dont vous avez bien voulu me donner la preuve de votre amitié précieuse hélas ! Jusqu’ici bien imméritée ! Je ne trouve point de paroles pour remercier de tant de gentillesses de la part de votre chère famille... Ces beaux moments de discussions littéraires passés en votre chère compagnie ne pourront point si vite repasser, quand-même j’espère que le bon Dieu ne me refusera pas le bonheur de vous revoir, tous en meilleure santé.
Quant à moi : la famille où je n’ai voulu que passer les Fêtes de Noël, me retient toujours. Aussi le petit garçon, mon élève parle déjà presque parfaitement l’italien.
Je ne travaille plus pour la poésie hongroise mais bien pour l’italienne. à la Grande Nation, pour que celle-ci en la connaissant, lui rende justice finisse par l’aimer et respecter. Mes pauvres poètes hongrois avec leur pauvre traducteur français doivent attendre et toujours attendre un temps plus salutaire – lorsqu’avec – la paix rétablie, aussi la vie ancienne reprendra son cours d’un temps et les publics auront un sens aussi pour la poésie et non seulement...
Les canons se taisent mais les tempêtes déchaînées font trembler encore la terre et l’angoisse de l’incertitude du futur pèse sur notre âme tel un cauchemar lugubre.
Je voudrais travailler, de vivre ces quelques jours que la Providence veut m’accorder en paix, mais voici les nouvelles alarmantes d’une nouvelle mobilisation...
Poveri noi !
Ada Negri, Leopardi, D’Annunzio, Prate de[ ?] sont de grands poètes. J’ai à peu près une vingtaine de traduction et je suis sûr que les poètes italiens trouveront plus vite un éditeur que leurs compagnons hongrois. Du reste selon les journaux d’ici en Hongrie on n’a point le temps pour la poésie... le chaos général dure toujours, et le public hongrois doit avoir malheureusement autre chose par la tête.
J’ai trouvé ici un libraire-éditeur qui s’intéressait beaucoup à l’Anthologie projetée, il voulait en entreprendre la publication mais (hélas ! il y a toujours des « mais ») le prix de papier étant augmenté depuis le 1/3 de 100% mon bon Monsieur l’éditeur n’y trouve plus son calcul. Depuis 7 ans je caresse un beau rêve, celui de faire connaître les nobles sentiments d’âme d’une nation tellement maljugée car trop méconnue.
Je vous prie bien cher Monsieur de m’excuser si je vous ai trop ennuyé ; mais votre noble âme me comprendra bien... Veillez transmettre mes voeux les plus ardants à Madame votre épouse, mes meilleures salutations et respect à Mme votre fille, aux MM. vos fils et un baiser (si gentil comme vous l’êtes !) à la petite Sarah... (Sachant que ce bécot vient de ma part elle détournera sûrement sa mignonne petite tête !)
Vous aurez sûrement terminé votre grande oeuvre, vous pouvez en être fier et heureux Monsieur. Que le bon Dieu vous accorde la faveur de pouvoir encore longtemps et beaucoup créer pour la gloir de votre, de notre nation. Que le bon Dieu vous benisse avec votre famille.
Recevez bien cher Monsieur en hommages les plus respectueux et les plus affectueux de votre bien dévoué Paul Verts[ ?]
P.S. Je vois cet ange qui
« passe par les champs pleins de sang, pleins de pleurs
« et fait tomber sur chaques tombe une fleur... »
et je rêve... je rêve... si cela durait éternellement.