GYA057
Language: French
Repository: Petőfi Museum of Literature
Document type: Letter written by hand
Publisher: Tüskés Anna (10-02-2018)
Folio number: 1
Mon cher Berci,
Ton télégramme hier soir nous a profondément émus Irène et moi. Nous te remercions et de toute façon nous étions sùrs que, dès que tu apprendrais la nouvelle, tu en serais, toi aussi, douloureusemenrt touché
Tu sais peut-être qu’étant cloué au lit depuis 4 semaines par une très douloureuse et très tenace sciatique des deux jambes avec interdiction du dr Charmant (que Nándi a bien connu) je ne pouvais que lui obéir et pas me lever. Dans ces conditions, Irène n’a pas voulu partir seule, d’autant plus qu’au moment où le mardi 14 le télégramme angoissant de l’ex-mari de Klari puis, quelques heures plus tard, le coup de téléphone de celui-ci et de leurs enfants chez notre voisine apprenant que c’était fini, ne lui auraient pas permis de revoir sa fille vivante.
Bien sûr, dans une lettre du 27 avril, reçue le 3 mai, Klari nous disait qu’ayant de terribles douleurs, le ventre gonflé et la fièvre elle avait fini par accepter comme son médecin le voulait déjà bien des jours plus tôt, d’entrer à l’hôpital, attendant seulement qu’un lit soit libre. Mais pas d’autres détails. Et comme elle disait en même temps qu’elle se réjouissait d’avance de venir nous voir en été, nous espérions que cette fois, comme tant d’autres, elle sortirait d’affaire.
J’ai eu de tes nouvelles au moment ou Nándi vers le début de janvier m’avait demandé des renseignements biographique au sujet d’Anna Langsuo (?) que je lui ai envoyé Je pense qu’il a reçu. Bien sûr dès la parution, Klari nous avait envoyé ton livre de souvenirs sur ta mère et ton village dont tu nous avais parlé en mai 72, lors de notre courte rencontre. J’en avais écrit un compte-rendu pour le supplément littéraire du Monde qui ne l’a pas publié et j’en parlais aussi dans un article en allemand qu’un de mes amis de Karlsruhe m’avait demandé, la revue à laquelle il était destiné ayant répondu qu’il avaient déjà donné quelquechose en 69 sur la littérature hongroise et que cela suffisait, mon papier n’a jamais paru.
Grâce à un très bon ami d’ici, Guy Rohan qui est collaborateur régulier de la NRF et dont les romans ont paru chez Gallimard (qui vient du reste de refuser le 5e et plus remarquable à mes yeux qu’il ait écrit) j’ai pu faire passer une traduction de Déry auquel on s’intéressait et maintenant pour le no de juin une nouvelle de Krúdy ”Szindbad titka” Si je n’avais depuis le 20 mars eu tant d’ennuis de santé cystite, inflammation de la prostate et peu après ces sciatiques, je comptais aller à Paris ces temps-ci et voir les gens de la NRF. Impossible d’y songer actuellement. La disparition de Klari a remué en nous tant de choses que pour la 2e fois – la première ayant été notre départ forcé en 49 – j’ai l’impression que du jour où nous avons quitté la Hongrie notre vie a été coupée en deux. Mon cher Berci encore merci. Embrasse pour nous Magda et Nándi. Nous t’embrassons de tout coeur tous les deux
{François